Discours d’Olivier Véran - Sommet mondial de la santé mentale

5 octobre 2021

Sommet mondial de la santé mentale « Mind Our Rights, Now ! » - 5 octobre 2021
Seul le prononcé fait foi

Monsieur le Directeur Général de l’Organisation Mondiale de la Santé,
Monsieur le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies,
Madame la Directrice Générale de l’UNICEF,
Mesdames et Messieurs les responsables de toutes les institutions internationales représentées ici,
Votre Majesté, Madame la reine Mathilde de Belgique,
Votre Altesse royale, Madame la princesse Mabel van Oranje-Nassau, des Pays-Bas,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les professionnels, les experts, les représentants des institutions, des organisations non gouvernementales et de la société civile, des personnes concernées et des familles.

Chers amis,

Au nom de la France et du Président de la République Emmanuel Macron, je vous souhaite la bienvenue, ici à Paris, pour ces deux journées du 3ème sommet mondial sur la santé mentale. Je vous remercie de votre participation.

C’est une très grande fierté et une grande responsabilité pour la France, patrie des droits de l’Homme, d’organiser cette édition du sommet mondial dédiée aux droits en santé mentale : « Mind our rights now ! ».

C’est aussi un immense honneur pour moi, ministre des solidarités et de la santé, d’en ouvrir les travaux.

Ce sommet prend place dans un contexte particulier, qui justifie d’ailleurs des conditions d’organisation singulières, je veux bien entendu parler de la pandémie mondiale de la Covid, qui perdure et qui nous commande de ne pas baisser la garde. Elle nous a contraint à reporter d‘un an ce sommet prévu initialement en octobre dernier ; elle nous oblige aujourd’hui à tenir l’événement pour partie en visio-conférence. Nous aurions bien sûr préféré vous accueillir tous, mais cette crise nous apprend à nous adapter.

Mais dans le même temps, cette crise sanitaire souligne l’urgence et justifie plus encore l’opportunité de cet événement mondial sur la santé mentale.

La Covid en effet marque les corps, mais tout autant les esprits. Des expériences de vie diverses et éprouvantes ont créé de la souffrance psychique chez nombre de nos compatriotes.

C’est la confrontation soudaine avec la mort ; c’est l’angoisse de la maladie et de ses séquelles ; c’est l’incertitude de ses conséquences économiques, individuelles et collectives, et la peur de basculer dans la précarité ; c’est l’isolement social et la perte du lien avec les autres…

Les données recueillies en France tout au long de la crise nous montrent ainsi que près d’un quart des français déclarait un état dépressif fin avril dernier.

Si ce chiffre a légèrement diminué ces derniers mois, il reste élevé. Et les autres indicateurs qui pourraient signaler une amélioration ne marquent pas d’évolution significative : il en est ainsi de la satisfaction de vie, du maintien à un niveau élevé des états anxieux, des problèmes de sommeil, voire de la prégnance des pensées suicidaires.

Certes, la crise sanitaire ne nous a pas fait découvrir la santé mentale comme déterminant essentiel de la santé globale, pour l’individu comme pour la société. Certes le Gouvernement français n’a pas attendu la crise pour inscrire la santé mentale comme une priorité de sa politique de santé.

Mais de fait, la crise sanitaire a conduit à une prise de conscience encore plus unanimement partagée de l’importance de la santé mentale, et donc, de l’engagement collectif renforcé qu’elle exige.

Par ailleurs, si la crise a mis en évidence les failles et les limites de nos dispositifs de prise en charge de la santé mentale, elle a révélé aussi les formidables capacités d’engagement, de mobilisation et d’innovation de leurs acteurs – professionnels, institutionnels, usagers et aidants – pour conduire les évolutions nécessaires de nos réponses.

La pandémie a replacé la santé mondiale, et particulièrement pour la santé mentale, au coeur de nos priorités. Elle a occasionné une mobilisation inédite de nombreux pays.

Cette mobilisation pour la santé mentale qui se généralise et s’accélère au plan international, renforce la pertinence de la démarche engagée il y a trois ans par l’Alliance des défenseurs de la santé mentale et du bien-être.

Le sommet de Paris aujourd’hui prolonge le mouvement initié par les rencontres de Londres en 2018 et d’Amsterdam 2019.

Son ambition est d’être un nouveau jalon dans la prise en compte de la santé mentale, en contribuant au maintien dans le temps de cette mobilisation internationale au service des personnes en souffrance psychique.

En effet, nous sommes convaincus que cette dynamique internationale est un levier pour mobiliser les politiques nationales, mettre au point des réformes, les conduire et favoriser les investissements dont ce champ à besoin.

Le thème des droits en santé mentale retenu pour le sommet fait aussi pleinement écho à l’actualité : le respect des Droits fondamentaux dans les systèmes de prise en charge des personnes ayant un problème de santé mentale et/ou en situation de handicap psychique, est l’un des sujets cruciaux mis en lumière pendant la crise sanitaire.

La question des Droits en Santé mentale est en effet posée partout dans le monde aujourd’hui. Elle s’inscrit en cohérence avec de nombreux textes et programmes internationaux, tels que :

  • Les résolutions du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies sur la santé mentale et les droits de l’homme ;
  • La Convention des Nations-Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CIDPH) ;
  • Le programme QualityRights de l’OMS, outil d’accompagnement aux changements des pratiques dans les services de psychiatrie et santé mentale.

La dynamique internationale n’a jamais été aussi porteuse, au vu du nombre d’initiatives qui émergent et du nombre de voix qui s’élèvent pour témoigner et plaider en faveur d’un plus grand respect des Droits en santé mentale. Le sommet s’appuie sur cette mobilisation internationale.

Cette mobilisation de la France en faveur des droits s’inscrit dans une approche globale de notre politique de santé mentale dont je souhaite rappeler en quelques mots les enjeux et les lignes directrices, avant d’évoquer les objectifs que nous proposons d’assigner à ce sommet.

En France, les dépenses de santé mentale sont notre premier poste de dépenses de santé, avec plus de 23 Mds € ; 30 Md€ avec les aides indirectes et plus de 110Md€ pour le fardeau économique total des troubles psychiques.

Nous avons des professionnels, des équipes, des établissements et des services de grande qualité, pleinement investis, mais la crise Covid a souligné les efforts que nous avions encore à faire en matière de prévention, de lutte contre la stigmatisation de la maladie mentale et de développement des réponses ambulatoires.

C’est pour répondre à ces défis que le Gouvernement a engagé il y a trois ans une stratégie complète et cohérente, autour de trois priorités :

  1. promouvoir la santé mentale et prévenir la souffrance psychique ;
  2. garantir des parcours de soins de qualité, accessibles et coordonnés ;
  3. favoriser l’insertion sociale et la citoyenneté des personnes en situation de handicap psychique.

Cette feuille de route vise à dépasser une vision uniquement sanitaire, pour répondre à tous les besoins inhérents à la santé mentale.

Il y a quelques jours, cette ambition a été hautement réaffirmée par le Président Emmanuel Macron lui-même, en clôture des Assises nationales de la santé mentale et de la psychiatrie, qui rassemblaient tous les acteurs impliqués. Il a ainsi appelé à une mobilisation collective et annoncé un renforcement significatif de notre investissement en faveur de la santé mentale.

C’est donc dans ce contexte où la santé mentale est au coeur de nos préoccupations et de notre actualité, que prend place ce sommet. Nous comptons beaucoup sur la richesse de ses échanges et de ses conclusions, pour continuer à avancer, non pas en solitaires, mais bien en nous inscrivant dans ce mouvement d’ensemble qui porte la communauté internationale tout entière.

Après Londres 2018 et Amsterdam 2019, Paris doit être le sommet qui pérennise ce rendez-vous annuel. Ce rendez-vous représente en effet une interface tout à fait originale entre les grands textes internationaux, les acteurs de terrain et les décideurs politiques.

Ensuite, il s’agit de susciter l’adhésion du plus grand nombre de pays possible au projet d’un rendez-vous annuel pour des échanges internationaux, comme levier pour soutenir les pays dans leurs politiques nationales.

A cet effet, il me semble que ce sommet doit avoir une double ligne directrice :

  • D’une part, illustrer et convaincre par ses travaux et ses échanges qu’il est possible, même pour des pays ne disposant pas encore des systèmes de santé les plus robustes, de garantir, par le respect des droits des personnes, un parcours de vie et de soins satisfaisant aux personnes ayant un problème de santé mentale ou en situation de handicap psychique ;
  • D’autre part, consolider comme une vraie force motrice pour la communauté internationale et avec l’appui de l’OMS, le leadership des pays qui se sont particulièrement engagés en faveur de la santé mentale.

A ce titre, le prisme des Droits, fil conducteur de ce sommet, offre une perspective universelle et fédératrice, qui doit bénéficier à tous les acteurs.

Enfin, il s’agit, par quelques propositions concrètes à débattre, d’intensifier à l’issue de ce sommet, la structuration des échanges entre les professionnels, la société civile et les décideurs politiques, dans une approche réseau. L’inclusion ou le renforcement du volet « santé mentale » dans certaines actions internationales pourraient être recherchés. A cet égard, nous attendons des recommandations des groupes de travail de cet après midi et de demain matin.

Le programme qui vous est proposé pour ces deux jours entend répondre à ces objectifs.

Je tiens enfin à remercier tout particulièrement, toutes celles et ceux, institutions internationales, experts gouvernementaux, experts d’expérience et professionnels, français et étrangers qui se sont mobilisés depuis des mois pour faire de ce sommet un succès.

Ma participation à différents moments de ces deux jours, ainsi que celle de Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat auprès du Premier Ministre en charge des personnes handicapées, témoignent de toute l’importance que nous accordons à l’événement. Nous serons très attentifs à ses conclusions.

Je souhaite pleine réussite à vos travaux.

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