Les droits des patients en psychiatrie

Toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques ou sa famille dispose du droit de s’adresser au praticien ou à l’équipe de santé mentale de son choix.

Les soins psychiatriques libres sont la règle générale. Les patients concernés bénéficient des mêmes droits que les autres malades. Ce régime de soins est privilégié chaque fois que l’état de santé du patient le permet.

Cependant, il existe un dispositif des soins sans consentement qui permet de dispenser les soins nécessaires aux patients qui n’ont pas conscience de leurs troubles mentaux ni de leur besoin impératif de soins.

Il convient de souligner que ces modalités de soins sans consentement demeurent l’exception par rapport à l’ensemble des prises en charge hospitalières assurées dans les établissements de santé en France (en 2018, on compte 82 000 patients hospitalisés sans consentement pour un total de 424 000 patients hospitalisés en psychiatrie [1]).

La loi encadre ces soins psychiatriques sans consentement et prévoit des garanties spécifiques pour assurer le respect des droits et libertés des personnes concernées.

Le cadre juridique
La loi du 27 septembre 2013 a complété la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge afin de renforcer le respect des droits des patients. À la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 19 juin 2020, le Gouvernement œuvre à l’amélioration de la garantie du respect des droits des patients s’agissant de l’encadrement des mesures d’isolement et de contention. Le cadre juridique est en cours d’évolution dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

Il existe deux procédures d’admission en soins psychiatriques :
 sur décision du directeur d’établissement ;
 sur décision du représentant de l’État.

La loi prévoit alors les conditions garantissant la protection des droits et libertés de la personne.

 Les droits de la personne admise en soins psychiatriques sans consentement psychiatriques

Au préalable, il convient de rappeler que si des restrictions à l’exercice des libertés individuelles doivent être mises en œuvre, celles-ci ne peuvent être qu’adaptées, nécessaires et proportionnées en application de l’article L.3211-3 du code de santé publique.

  • Droit d’information sur les décisions relatives à son admission et son maintien en soins psychiatriques ainsi que sur ses droits, sa situation juridique et les voies de recours qui lui sont ouvertes. Ce droit inclut pour la personne un accès à son dossier médical, qui peut être ici subordonné à la présence d’un médecin en fonction de l’état psychologique de la personne.
  • Droit de communiquer avec le représentant de l’État, le président du tribunal judicaire, le procureur de la République et le maire qui reçoivent les réclamations des patients et vérifient, le cas échéant, que les droits des patients sont respectés.
  • Droit de saisir la Commission des usagers (CDU) et la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP). Cette saisine permet aux patients, en cas de besoin, d’exprimer leurs griefs auprès de ces commissions qui veillent au respect des droits des malades. Le patient ou toute personne susceptible d’agir dans son intérêt peut également saisir le juge des libertés et de la détention (JLD) dans le but qu’il ordonne une mainlevée immédiate d’une mesure de soins psychiatriques. Le JLD peut se saisir d’office ou être saisi par le procureur de la République.
  • Droit de prendre conseil auprès d’un médecin ou d’un avocat de son choix.
  • Droit d’avertir le contrôleur général des lieux de privation de liberté de toute situation relevant de l’atteinte aux droits fondamentaux de la personne privée de liberté.

Le patient dispose enfin du droit d’émettre ou de recevoir des courriers, de consulter le règlement intérieur de l’établissement et de recevoir toutes explications s’y rapportant, d’exercer son droit de vote et de se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.

Par ailleurs, toute personne admise en soins psychiatriques conserve, à l’issue de ces soins, la totalité de ses droits et devoirs de citoyen, sans que ses antécédents psychiatriques puissent lui être opposés.

 Les modalités spécifiques de l’admission en soins psychiatriques sur décision du directeur d’établissement

>> Situations concernées

À la demande d’un tiers ou en cas de « péril imminent », les soins psychiatriques peuvent être dispensés sur décision du directeur de l’établissement conforme à un avis médical lorsque les troubles mentaux du patient rendent son consentement impossible et que son état nécessite des soins immédiats et une surveillance constante ou régulière.

>> Qui peut demander l’admission ?

Le « tiers » demandeur des soins doit être un membre de la famille ou toute personne susceptible d’agir dans l’intérêt du malade et ayant avec lui une relation antérieure à la demande de soins.

Les pièces à fournir
La demande du tiers doit être accompagnée de deux certificats médicaux de moins de 15 jours attestant des troubles mentaux de la personne concernée, le premier ne pouvant pas être établi par un médecin exerçant dans l’établissement accueillant le malade.
En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical pouvant émaner d’un médecin exerçant dans l’établissement.

>> La notion de « péril imminent »

En cas d’urgence et de risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade et s’il est impossible de recueillir une demande de tiers, le directeur de l’établissement peut prononcer une admission à l’appui d’un seul certificat médical attestant de ce péril, rédigé par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement d’accueil et datant de moins de 15 jours.

>> Le maintien en soins psychiatriques

Sur la base des certificats médicaux établis dans les 24 et 72 premières heures, puis tous les mois, le directeur de l’établissement d’accueil prononce le maintien des soins sous la forme de prise en charge retenue par le psychiatre de l’établissement.

 Les modalités spécifiques de l’admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État

>> Situations concernées

L’admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État peut être prononcée pour les personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sureté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

Le cas des mineurs
Le mineur peut être soumis à une décision d’admission en soins psychiatriques à la demande du représentant de l’État. Hormis cette procédure, seuls les titulaires de l’autorité parentale, le tuteur ou le juge aux affaires familiales peuvent demander, à l’encontre du mineur, une admission en soins psychiatriques ou la levée d’une telle mesure

>> Qui décide ?

C’est le préfet de police à Paris et les préfets dans les départements qui prononcent cette admission en soins psychiatriques par arrêté au vu d’un certificat médical circonstancié. En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes attesté par un avis médical, les maires et, à Paris, les commissaires de police, peuvent prendre toute mesure provisoire, notamment d’hospitalisation, à l’égard de personnes révélant des troubles mentaux manifestes. En l’absence de décision préfectorale dans les 48 heures, la mesure est caduque.

>> Quelle est la procédure d’admission ?

Le représentant de l’État prononce, au vu d’un certificat médical établi par tout médecin hormis les psychiatres de l’établissement d’accueil, un arrêté décidant de l’admission d’une personne en soins psychiatriques. Après l’admission, le représentant de l’État autorise la forme de prise en charge de la personne malade (hospitalisation complète ou programme de soins) proposée par le psychiatre. Dans l’attente de cette décision, la personne malade reste sous hospitalisation complète. Par la suite, des certificats médicaux sont établis tous les mois. Un arrêté de maintien doit être pris avant la fin du premier mois, puis du troisième, puis tous les six mois, faute de quoi la mesure est caduque.

 Les modalités de prise en charge de la personne atteinte de troubles psychiatriques en soins sans consentement

>> La période initiale d’observation

La loi prévoit une période d’observation et de soins d’une durée maximale de 72 heures sous la forme d’une hospitalisation complète afin de permettre au psychiatre d’adapter au mieux les modalités de sa prise en charge. Cependant, rien ne s’oppose à ce que la mesure soit levée dans les 24 heures si elle s’avère injustifiée.

Si les deux certificats médicaux établis, l’un dans les 24 heures, puis dans les 72 heures de l’hospitalisation, concluent à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques, un psychiatre de l’établissement d’accueil propose la forme de la prise en charge :

  • soit l’hospitalisation complète ;
  • soit des soins sous une autre forme comportant des soins ambulatoires, des soins à domicile ou, le cas échéant, des séjours en établissement ou des hospitalisations partielles. Dans ce cas, un programme de soins sera élaboré.

>> Qu’est-ce que le « programme de soins » ?

Lorsqu’un patient n’est pas hospitalisé à temps plein (forme de prise en charge dite « en hospitalisation complète »), sa prise en charge (types de soins, lieux de réalisation et périodicité) est précisée par un programme de soins établi par le psychiatre de l’établissement d’accueil. L’avis du patient est recueilli préalablement à l’élaboration et à toute modification du programme. Le patient en programme de soins ne peut se voir administrer des soins de manière coercitive ni être conduit ou maintenu de force pour accomplir, le cas échéant, un séjour en établissement sans que la forme de sa prise en charge ait été préalablement transformée en hospitalisation complète. En effet, le psychiatre peut, en fonction de l’évolution de l’état du patient, modifier sa prise en charge et notamment demander la ré-hospitalisation à temps plein du patient si la prise en charge partielle n’est plus adaptée ou lorsque le patient ne suit pas son programme de soins.

 La levée d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement

La levée de la mesure d’admission en soins psychiatriques sur décision du directeur d’établissement peut être obtenue de diverses façons :

  • sur certificat médical émanant d’un psychiatre de l’établissement, qui atteste que l’état de santé de la personne ne justifie plus de la mesure de soins. Le directeur de l’établissement prononce alors la levée de la mesure de soins ;
  • sur demande de la commission départementale des soins psychiatriques ;
  • sur demande d’un membre de la famille, du tuteur ou du curateur de la personne qui fait l’objet de soins ou de toute personne faisant état de relations antérieures à l’admission en soins avec le malade et agissant dans l’intérêt de la personne, si le directeur ne s’oppose pas, conformément à l’avis médical, à la levée des soins ;
  • par décision judiciaire de mainlevée du JLD qui peut être saisi par le procureur de la République, le patient ou toute personne lui portant intérêt.

La levée de la mesure d’admission en soins psychiatriques à la demande du représentant de l’État peut être obtenue de diverses façons :

  • soit sur certificat de demande de levée rédigé par un psychiatre participant à la prise en charge du malade et transmis dans les 24 heures au représentant de l’État qui doit statuer sans délai ;
  • soit par décision judiciaire du JLD qui peut être saisi par le procureur de la République, le patient ou toute personne lui portant intérêt.

Par ailleurs, une procédure administrative et judiciaire est prévue lorsque le psychiatre estime que la poursuite de l’hospitalisation complète n’est plus nécessaire et que le représentant de l’État ne souhaite pas lever la mesure. Dans ce cas, le représentant de l’État demande immédiatement un deuxième avis de psychiatre :

  • si les deux avis médicaux sont concordants, le représentant de l’État doit suivre ce double avis ;
  • si le deuxième avis est favorable à l’hospitalisation complète, le représentant de l’État peut maintenir l’hospitalisation complète.

Lorsque ces avis divergent ou préconisent le maintien de la mesure de soins psychiatriques et que le représentant de l’État la maintient, il en informe le directeur d’établissement d’accueil, qui saisit le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier statue à bref délai sur cette mesure.

Le contrôle systématique du JLD peut mettre fin à des soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète. La loi prévoit le contrôle systématique par le JLD des hospitalisations complètes, au plus tard le 12e jour d’hospitalisation, puis au bout de six mois d’hospitalisation complète continue. Le juge peut décider de mettre fin ou non à l’hospitalisation complète. S’il lève cette mesure, il peut acter que cette levée ne prendra effet qu’après 24 heures maximum, pour que l’équipe médicale établisse, si nécessaire, un programme de soins.

En résumé

Les soins psychiatriques requièrent, par principe, comme toute autre intervention sur la personne malade, le libre consentement de celle-ci. Lorsqu’il est nécessaire de recourir aux procédures de soins psychiatriques sans consentement (sur décision du directeur d’établissement ou du représentant de l’État), la personne malade bénéficie de mesures de protection garantissant ses droits et libertés.
Besoin d’informations complémentaires ?

 La page du Psycom : « Les droits en psychiatrie ».
 Les droits des usagers de la santé : « Parcours de santé, vos droits ».
 Le site du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
 Le site du Défenseur des droits.
 Le site de la Fédération Nationale des Association d’Usagers en Psychiatrie.
 Le site de l’Unafam, association ayant pour objectif d’accueillir, écouter, soutenir, former, informer et accompagner les familles et l’entourage de personnes vivant avec des troubles psychiques.
 Le Centre collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé (CCOMS) pour la recherche et la formation en santé mentale soutient qui développe le programme de l’OMS pour l’évaluation de la qualité et du respect des droits des personnes ayant un problème de santé mentale en France et dans les pays francophones (programme QualityRights).

[1Chiffres clés de la psychiatrie par ATIH à partir des données issues du Rim-P 2018, chiffres arrondis au millier près, juin 2019